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Vie professionnelle des aidants : un challenge et une chance

Ma ville au quotidien

Publié le 1 octobre 2024 par Amandine Le Blanc

Être aidant est une réalité vécue par de plus en plus de travailleurs, mais encore trop peu prise en compte par les entreprises. Pourtant, une vie professionnelle bien accompagnée peut être bénéfique pour tout le monde.

Le 6 octobre, c’est la Journée nationale des aidants. En France 9,3 millions de personnes* se déclarent proches aidant. C’est-à-dire qu’ils apportent une aide régulière à des proches en perte d’autonomie à cause de la maladie, du handicap, de l’âge. Et plus de la moitié d’entre eux sont en activité professionnelle.

Aujourd’hui, un actif sur cinq est aidant et en 2030, on estime qu’ils représenteront 25 % des travailleuses et travailleurs. Un sujet sociétal qui n’irrigue pas encore assez la culture des entreprises, alors même que pour les salariés, le « statut » d’aidant a un impact aussi sur leur vie professionnelle.

*Chiffres 2021 rapport Drees.

Libérer la parole

Quand le fils de Nathalie Lalandec a été diagnostiqué d’un trouble du spectre de l’autisme il y a neuf ans, « cela a été un tsunami dans notre vie avec mon mari », confie-t-elle. À l’époque, elle travaille déjà dans son entreprise actuelle, et manage une grosse équipe de 49 personnes sur six départements. « On se retrouve noyé dans les rendez-vous médicaux. Ce qui a été clair pour moi très rapidement, c’est que je ne pouvais plus faire mon métier d’avant. Soit on acceptait de m’aider, soit je perdais mon job », raconte-t-elle. Par chance, elle a pu compter sur le soutien de sa directrice, « elle m’a vraiment sauvé la vie », pour faire évoluer son poste puis en changer.

Si Nathalie a pu compter sur un environnement de travail bienveillant et accompagnant, beaucoup d’aidants actifs hésitent encore à parler de leur situation au travail. « Il y a plusieurs raisons à cela, explique Meriç Duranson, qui avec sa structure Yakamoz accompagne les entreprises sur le sujet des salariés aidants et a réalisé son mémoire sur le thème. Les études montrent qu’ils ont peur d’être stigmatisés par leurs collègues, de perdre leur travail ou d’être forcés de passer à temps partiel. Ils pensent également que cela peut représenter un frein dans leur carrière. Et de manière générale, les gens sont aussi réticents à partager leur vie personnelle au travail ».

Pourtant, pouvoir être transparent sur leur situation au travail permet aux aidants d’alléger une charge mentale qui est déjà énorme. « J’ai voulu en parler rapidement à mes collègues pour éviter les quiproquos. J’avais des collaborateurs qui ne comprenaient pas pourquoi tout d’un coup, je n’étais plus la même », souligne Nathalie.

On n’a pas à mentir, à se cacher, ça permet d’être plus léger.

Nathalie Lalandec,

aidante de son fils et cheffe de projet dans une banque

Maylis de Marcellus, elle aussi aidante pour trois de ses enfants, n’a jamais fait mystère de sa situation personnelle auprès de ses différents employeurs. « J’en ai toujours parlé à ma direction. Je voulais baliser suffisamment bien le terrain pour avoir du soutien et qu’on ne me pose pas 1000 questions », souligne-t-elle. Aménagement horaire pour pouvoir jongler entre tous les rendez-vous médicaux ou possibilité de pouvoir se libérer facilement en cas d’urgence lui ont permis de s’adapter. Nathalie de son côté a pu bénéficier de télétravail avant même qu’il soit mis en place dans son entreprise.

Même si quelques dispositifs légaux existent comme le congé proche aidant (CPA) ou le congé de présence parentale (CPP), les critères sont assez restrictifs et sont loin de pouvoir s’appliquer à toutes les situations. Et pour Maylis et Nathalie, même si des bonnes pratiques peuvent être diffusées, l’accompagnement des aidants nécessite le plus souvent du cas par cas. « Je ne suis pas pour des aménagements psychorigides. Ce qui est difficile pour une entreprise, c’est que dans la vie d’un aidant ce n’est pas linéaire, il y a des périodes plus difficiles que d’autres. C’est donc du sur-mesure, mais qu’il faut réévaluer régulièrement pour que cela corresponde toujours à la réalité de l’aidant », souligne Nathalie Lalandec.

En février 2022, la Plateforme RSE, saisie par le gouvernement a rendu un avis avec 24 recommandations pour que les entreprises accompagnent mieux leurs salariés aidants : programme de soutien, sensibilisation, flexibilité dans l’organisation du temps de travail, valorisation des compétences acquises, etc.

Des recommandations dont il est plus facile de se saisir pour les grosses entreprises qui ont un pôle RSE (responsabilité sociale des entreprises). « Aujourd’hui il y a trois facteurs qui jouent dans les entreprises pour proposer des dispositifs pour les salariés aidants : leur taille, l’exposition à la concurrence et le taux de féminisation », explique Meriç Duranson.

Une bouffée d’oxygène

Au-delà de toute considération financière, il est aussi important pour les aidants de continuer à travailler, car bien souvent, cela représente aussi un salut pour eux. « À rester chez moi en permanence, ce n’était plus tenable, confie Maylis. Je me sentais comme enfermée, corvéable à merci. Pour trouver du répit, il fallait que j’aille travailler ». Le travail leur permet aussi d’avoir une place dans la société.

 J’avais besoin d’être reconnue et d’avoir une place autre que : la mère de, l’aidante de. Savoir qui je suis en tant que personne au milieu de tout ça.

Maylis de Marcellus,

aidante de ses filles et consultante retraite

Le lieu de travail devient aussi un endroit pour souffler. « Ce que je vivais chez moi était tellement surréaliste, il fallait que le travail soit mon lieu de normalité », souligne Maylis de Marcellus. Mais quand le travail devient une bouffée d’oxygène, « il y a aussi le risque qu’on ne veuille plus rentrer chez nous, de présentéisme et de burnout », nuance Nathalie. D’autant plus quand on veut prouver à son employeur qu’on est « malgré tout à la hauteur ».

Un atout dans le monde du travail

Pourtant, les aidants actifs ne doivent pas être vus simplement à travers le prisme de leurs besoins, mais également dans ce qu’ils peuvent apporter à une entreprise. Être aidant leur permet de développer des qualités qui sont transférables en compétences utiles dans le monde du travail.

Capacité d’organisation et de gestion du temps, résolution de problèmes complexes, qualité de communication et de travail en équipe, maîtrise des équipements et technologies etc sont autant d’atouts qui peuvent servir sur le plan professionnel. « Il faut s’inscrire dans un temps long, mais quand on vous laisse vous réinventer, il y a un bénéficie à en tirer », estime Nathalie Lalandec. Elle en sait quelque chose. Cette dernière a pu évoluer dans son emploi et proposer un poste qui n’existait pas. Aujourd’hui elle est cheffe de projet de la filière santé-bien vieillir et s’est spécialisée sur les proches aidants.

Et au-delà même de son emploi, malgré les difficultés, elle en est persuadée beaucoup de positif est aussi à tirer du rôle d’aidant. « Mon fils m’a emmené sur un chemin où je ne serais jamais allée de moi-même. Même si ça reste dur, je vis des rencontres merveilleuses et des émotions fortes. Cela donne un sens différent à notre vie ».

Le collectif Métropole Aidante en partenariat avec la Métropole de Lyon organisent le vendredi 4 octobre la Journée nationale des aidants.

De 10h à 18h à l’Hôtel de la Métropole, 20 rue du Lac, 69003 Lyon.
Au programme :

  • stands d’information pour rencontrer les 180 membres du collectif de métropole aidante et découvrir des solutions de répit.
  • ateliers bien être
  • rencontre avec Vincent Valinducq auteur du livre « Je suis devenu le parent de mes parents ».
  • Pour la première fois un village des aidants actifs sera aussi proposé pour recueillir de l’information sur le sujet.
    Programme et inscription.
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